Le Monde Diplomatique, novembre 2007, n° 644, pag. 1
Voracità

di Ignacio Ramonet
(traduzione dal francese di José F. Padova)

Mentre contro l’orrore economico il discorso critico – che un tempo veniva chiamato altermondialiste [ndt.: traducibile con: terzomondialista] – s’ingarbuglia e diventa improvvisamente impercettibile, s’impianta un nuovo capitalismo, ancor più brutale e conquistatore. È quello di una nuova categoria di fondi-avvoltoio, i private equities, fondi d’investimento con appetiti da orco che dispongono di capitali colossali (1).
I nomi di questi titani - The Carlyle Group, Kohlberg Kravis Roberts & Co (KKR), The Blackstone Group, Colony Capital, Apollo Management, Starwood Capita! Group,Texas Pacific Group,Wendel, Eurazeo, ecc - sono poco conosciuti dal grande pubblico e, al riparo di questo riserbo, stanno impadronendosi dell’economia mondiale. In quattro anni, dal 2002 al 2006, l’ammontare dei capitali prelevati da questi fondi d’investimento, che raccolgono denaro da banche, assicurazioni, fondi di pensionamento e da ricchissimi privati, è passato da 94 miliardi di euro a 358 miliardi. La loro potenza di fuoco finanziaria è fenomenale, supera i 1100 miliardi di euro! Nulla resiste loro. L’anno scorso, negli Stati Uniti, i principali private equities hanno investito qualcosa come 290 miliardi di euro nella rilevazione di aziende e più di 220 miliardi nel corso del solo primo semestre del 2007, assumendo così il controllo di ottomila società… già ora un salariato americano su quattro – e quasi un salariato francese su dodici – lavorano per questi mastodonti (2).
D’altra parte la Francia è diventata il loro primo bersaglio, dopo il Regno Unito e gli Stati Uniti. L’anno scorso hanno fatto man bassa su quattrocento imprese (per un importo di 10 miliardi di euro) e ne gestiscono ormai più di milleseicento. Alcuni marchi molto noti - [ndt.: segue elenco di grandi Società francesi] - si ritrovano sotto il controllo di private equities, per lo più anglosassoni, che adesso già mettono gli occhi su dei giganti del CAC 40 [ndt.: l’indice borsistico CAC 40, che prende nome dal primo sistema di automazione della Borsa di Parigi, la Cotation Assistée en Continu].
Il fenomeno di questi fondi rapaci è apparso una quindicina di anni fa ma, drogato da un credito a buon mercato e grazie alla creazione di strumenti finanziari sempre più sofisticati, negli ultimi tempi ha preso un’ampiezza preoccupante. Infatti il principio è semplice: un club d’investitori con grandi fortune decidono di acquistare imprese che in seguito gestiscono in modo privato, lontani dalla Borsa e dalle sue regole costrittive e senza dover rendere conto ad azionisti puntigliosi (3). L’idea è quella di aggirare i principi stessi dell’etica del capitalismo puntando soltanto sulle leggi della giungla.
In concreto, ci spiegano due specialisti, le cose avvengono così: «Per comprare una società che vale 100 il fondo mette 30 di tasca sua (si tratta di una percentuale media) e chiede in prestito 70 alle banche, approfittando dei tassi d’interessi molto bassi del momento. Durante tre o quattro anni riorganizza l’impresa, mettendovi un management di sua fiducia, razionalizzando la produzione, sviluppandone le attività e intercettando tutti o parte dei profitti per pagare gli interessi…del suo debito. In seguito a tutto ciò rivenderà la società a 200, spesso a un altro fondo che farà la medesima cosa. Una volta rimborsati i 70 presi a prestito gliene resteranno 130 in cassa, per una posta iniziale di 30, ovvero più del 300% di ricavo sull’investimento in quattro anni. Chi farebbe meglio (4)?»
Mentre personalmente intascano patrimoni demenziali, i dirigenti di questi fondi praticano ormai, senza patemi d’animo, i quattro grandi principi della «razionalizzazione» delle imprese: ridurre i posti di lavoro, comprimere i salari, aumentare i ritmi della produzione e delocalizzare. Incoraggiati in tutto ciò dalle pubbliche autorità, le quali sognano, come oggi fanno quelle francesi, di «modernizzare» l’apparato produttivo. E a grande scapito dei sindacati, che gridano all’incubo e denunciano la fine del contratto sociale.
Qualcuno pensava che con la globalizzazione il capitalismo fosse infine sazio. Adesso si vede che la sua voracità sembra non avere limiti. Fino a quando?
Ignacio Ramonet

(1) Vedi Frédéric Lordon, « Quand la finance prend le monde en otage », Le Monde diplomatique, settembre 2007.
(2) Vedi Sandrine Trouvelot e Philippe Eliakim, « Les fonds d’investissement, nouveaux maitres du capitalisme mondial », Capital, Paris, luglio 2007.
(3) Vedi Philippe Boulet-Gercourt, « Le retour des rapaces », Le Nouvel Observateur, Paris. 19 luglio 2007.
(4) Cfr. Capital, op. cit.

Testo originale :

Le Monde Diplomatique, novembre 2007, n° 644, page 1
Voracité
de Ignacio Ramonet

Tandis que, contre l’horreur économique, le discours critique — qu’on appela un temps altermondialiste — s’embrouille et devient soudain inaudible, un nouveau capitalisme s’installe, encore plus brutal et conquérant. C’est celui d’une catégorie nouvelle de fonds vautours, les private equities, des fonds d’investissement à l’appétit d’ogre disposant de capitaux colossaux (I ).
Les noms de ces titans —The Carlyle Group, Kohlberg Kravis Roberts & Co (KKR), The Blackstone Group, Colony Capital, Apollo Management, Starwood Capita! Group,Texas Pacific Group,Wendel, Eurazeo, etc. — demeurent peu connus du grand public. Et, à l’abri de cette discrétion, ils sont en train de s’emparer de l’économie mondiale. En quatre ans, de 2002 à 2006, le montant des capitaux levés par ces fonds d’investissement, qui collectent l’argent des banques, des assurances, des fonds de pension et les avoirs de richissimes particuliers, est passé de 94 milliards d’euros à 358 milliards Leur puissance de feu financière est phénoménale, elle dépasse les 1100 milliards d’euros ! Rien ne leur résiste. L’an dernier, aux Etats-Unis, les principaux private equities ont investi quelque 290 milliards d’euros dans des rachats d’entreprises, et plus de 220 milliards au cours du seul premier semestre 2007, prenant ainsi le controle de huit mille sociétés... Déjà, un salarié américain sur quatre — et près d’un salarié fran4ais sur douze — travaille pour ces mastodontes (2).
La France est d’ailleurs devenue, après le Royaume-Uni et les Etats-Unis, leur première cible. L’an dernier, ils y ont fait main basse sur quatre cents entreprises (pour un montant de I O milliards d’euros), et ils en gèrent désormais plus de mille six cents. Des marques fort connues — Picard, Dim, les restaurants Quick, Buffalo Grill, les Pages jaunes, Allociné ou Afflelou — se retrouvent sous le contròle de private equities, le plus souvent anglo-saxons, qui lorgnent maintenant sur des géants du CAC 40.
Le phénomène de ces fonds rapaces est apparu il y a une quinzaine d’années mais, dopé par un crédit bon marché et à la faveur de la création d’instruments financiers de plus en plus sophistiqués, il a pris ces derniers temps une ampleur préoccupante. Car le principe est simple : un club d’investisseurs fortunés décident de racheter des entreprises qu’ils gèrent ensuite de fa4on privée, loin de la Bourse et de ses règles contraignantes, et sans avoir à rendre compte à des actionnaires pointilleux (3). L’idée, c’est de contourner les principes mémes de I’éthique du capitalisme en ne pariant que sur les lois de la jungle.
Concrètement, nous expliquent deux spécialistes, les choses se passent ainsi : « Pour acquérir une société qui vaut 100, le fonds met 30 de sa poche (il s’agit d’un pourcentage moyen) et emprunte 70 aux banques, en profitant des taux d’intérét très faibies du moment Pendant trois ou quatre ans, il va réorganiser I’entreprise avec le management en piace, rationaliser la production, développer des activités et capter tout ou partie des profili pour payer les intéréts... de sa propre dette. A la suite de quoi, il revendra la société 200, souvent ò un autre fonds qui fera la méme chose. Une fois remboursés les 70 empruntés, il lui restera 130 en poche, pour une mise initiale de 30, soit plus de 300 % de taux de retour sur investissement en quatre ans. Qui dit mieux (4) ?»
Alors qu’ils gagnent personnellement des fortunes démentielles, les dirigeants de ces fonds pratiquent désormais, sans états dirne, les quatre grands principes de la « rationalisation » des entreprises : réduire l’emploi, comprimer les salaires, augmenter les cadences et délocaliser. Encouragés en cela par les autorités publiques, lesquelles, comme en France aujourd’hui, révent de «moderniser» l’appareil de production. Et au grand dam des syndicats, qui crient au cauchemar et dénoncent la fin du contrat social.
Certains pensaient qu’avec la globalisation le capitalisme était enfin repu. On voit maintenant que sa voracité semble sans limites. Jusqu’à quand ?
IGNACIO RAMONET.
(I) Lire Frédéric Lordo)), « Quand la finance prend le monde en otage », Le Monde diplomatique, septembre 2007.
(2) Lire Sandrine Trouvelot et Philippe Eliakim, « Les fonds d’investissement, nouveaux maitres du capitalisme mondial », Capitai, Paris, juillet 2007.
(3) Lire Philippe Boulet-Gercourt, « Le retour des rapaces », Le Nouvel Observateur, Paris. 19 juillet 2007.
(4) Cf. Capitai, op. cit.



Mercoledě, 14 novembre 2007